Lettre à la Sangha de Raphaël Doko Triet, abbé du temple Seikyuji

 

Chers  Amis:

J’ai évoqué, lors du dernier teisho, que lorsqu’un doute apparaît, il faut en faire son ami; éprouver de la reconnaissance envers le doute qui frappe à notre porte est le début de la sagesse.
Depuis des temps, immémoriaux, les illusions humaines issues de l’ignorance, de l’orgueil ou de l’aveuglement, se sont agglomérées en une forme corporelle. Et cependant, ce corps issu de nos parents n’est qu’un ensemble d’éléments dont l’apparition et la disparition, ne sont rien d’autre que l’apparition et la disparition de ces éléments sans sustance, sans identité.
Quand nos pensées cessent de s’enchaîner l’une après l’autre, et que chacune tranquillement s’efface; on appelle cela «réflexion océanique». Ainsi une fois libérée du doute – coagulation d’un moment qui obstrue le cours naturel de la rivière –, celle-ci revient à l’océan. «Réflexion océanique» signifie réflexion qui embrasse l’univers entier.

C’est la même chose pour zazen. Lorsque nous sommes assis dans cette posture, nous ne faisons qu’un avec tous les êtres, le temps et l’espace entier.

Ceci nous ramène à la phrase de Sekito Kisen:

«Sur dix pieds carrés, ce vieil homme illumine les formes et leur essence.»

J’ai reçu ce matin trois lettres de Bégonia qui, du fait de l’arrêt des transports aériens, étaient restées confinées en attente de reprendre leur route.
Cette même Bégonia qui m’a envoyé des messages m’annonçant qu’elle venait de quitter le temple de Seido Suzuki, et commençait son retour vers l’Europe.
Nous allons bientôt tous nous retrouver, et enfin nous asseoir zafu contre zafu.De mon âme à ton âme.
Raphaël.